Notre cher ami Salah Stétié est mort le 19 mai 2020, à l’âge de 90 ans. Il a été enterré sur sa demande à Tremblay-sur-Mauldre (dans les Yvelines) où il vécut de nombreuses années.
Diplomate, ancien délégué permanent du Liban à l’UNESCO, ambassadeur au Pays-Bas puis au Maroc, secrétaire général du Ministère des Affaires Etrangères à Beyrouth, poète, essayiste, fondateur de L’Orient Littéraire, Salah Stétié était une grande figure de la poésie contemporaine dont l’œuvre, écrite en français, est traduite dans les principales langues du monde. Ce grand «itinérant du songe et de l’action» s’est efforcé dans son œuvre de concilier les visions orientale et occidentale du monde Ce passionné de la Méditerranée fut véritablement un passeur entre l’Orient et l’Occident. Il fut aussi un ardent défenseur de l’Islam véritable, celui du juste milieu, face aux dérives extrémistes et obscurantistes, préférant, pour sa part, insister inlassablement sur les rapprochements considérables entre nos religions et nos civilisations.
En 2002, son ami Dominique de Villepin, alors ministre des affaires étrangères, l’avait convaincu de se présenter à l’Académie française au fauteuil de Léopold Cedar Senghor. Un Libanais, un Arabe, un musulman, un ami de la France et de la langue française, en vérité cela avait un sens. L ‘échec de cette candidature laisse perplexe, c’est un bon exemple d’une certaine cécité de la bien-pensance, du refus d’honorer l’Islam de la tolérance et aussi de l’ignorance de l’apport considérable de la littérature libanaise à la langue française.
En 2004, le même Villepin, devenu ministre de l’Intérieur (avant de prendre la fonction de premier ministre en 2005), lui remit les insignes de commandeur de la Légion d’honneur. Il déclarait «Ta soif, cher Salah, est celle du voyageur. Tes bagages sont tes œuvres, et l’ancien diplomate s’est transformé en un ambassadeur de la culture admiré dans le monde entier, dans la tradition de Claudel, Saint-John Perse, ou encore Octavio Paz ou Pablo Neruda. »
Dans l’ouvrage La francophonie et le dialogue des cultures, publié en 2001 aux éditions l’âge d’homme à l’occasion du sommet des chefs d’Etat et de gouvernements de la Francophonie à Beyrouth, Saleh Stétié avait donné une brillante conclusion affirmant que la langue française devait aider «la planète à se rééquilibrer». C’est l’honneur de la France et de sa langue d’avoir eu un tel compagnon de route.
Dr Zeina el Tibi
Dr Charles Saint-Prot
Présidente et directeur général de l’Observatoire d’études géopolitiques de Paris