La crise économique et financière qui frappe le Liban depuis plusieurs années a conduit à des décisions controversées et complexes de la part des autorités, illustrées récemment par la mesure gouvernementale visant à libérer les fonds de certaines entités publiques. Cette décision, prise lors d’une réunion du Conseil des ministres et présentée par le ministère des Finances, soulève plusieurs questions quant à son efficacité, son équité et ses répercussions potentielles sur l’économie libanaise déjà fragilisée.

Contexte de la décision

Le 17 octobre 2019, face à une crise économique sans précédent, des restrictions draconiennes ont été imposées sur les retraits et transferts en dollars américains pour les fonds déposés dans des comptes bancaires libanais. Cette mesure a également affecté les comptes de diverses entités publiques, parmi lesquelles l’armée libanaise, la Commission suprême de secours, le Conseil pour le développement et la reconstruction, ainsi que l’ESCWA (Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale).

Ces entités, qui jouent un rôle crucial dans la sécurité, l’aide humanitaire et le développement infrastructurel du pays, se sont retrouvées dans l’incapacité d’accéder pleinement à leurs fonds, entravant ainsi leurs opérations essentielles. La demande présentée au Conseil des ministres visait spécifiquement à modifier les conditions de ces fonds auprès des banques, dans l’espoir de relancer les activités vitales pour le pays.

La décision gouvernementale

Après examen, le Conseil des ministres a opté pour une “procédure appropriée” en coordination avec la Banque du Liban, afin de faciliter l’accès à ces fonds. Toutefois, cette décision n’a pas manqué de soulever des critiques. En effet, elle semble privilégier certaines entités au détriment d’autres demandeurs urgents tels que les hôpitaux, les universités, les municipalités et les caisses de sécurité sociale, qui subissent également les conséquences néfastes de la crise financière.

Des sources concernées ont qualifié cette mesure de “première ingénierie financière importante et exposée” affectant le gouverneur par intérim Waseem Mansouri. Elles pointent du doigt l’approche sélective du gouvernement, qui omet d’adresser les besoins d’autres institutions critiques, ainsi que des déposants généraux ayant subi de lourdes pertes sur leurs dépôts depuis plus de quatre ans.

Par ailleurs, cette décision est perçue comme une manœuvre dilatoire de la part du gouvernement et de la Banque du Liban (BDL), accusés de “gagner du temps” sans proposer de plan concret pour la récupération globale des dépôts. La critique s’étend également à la gestion du compte gouvernemental par la BDL, soupçonnée de limiter arbitrairement les dépenses publiques sous le prétexte de protéger le taux de change, malgré des réserves dépassant le milliard de dollars.

Une augmentation controversée des indemnités

Dans un contexte déjà tendu, le Conseil des ministres a également adopté une mesure augmentant les indemnités des ministres et des députés de 25 millions de livres libanaises, en plus d’un doublement de leur compensation habituelle. Cette décision, en pleine crise économique, a suscité l’indignation publique, étant perçue comme déconnectée des réalités et des souffrances de la population libanaise.

La gestion de la crise financière au Liban par les autorités fait face à un scepticisme croissant de la part de la population et des observateurs. Les mesures prises, bien que destinées à alléger certaines pressions, sont critiquées pour leur manque d’équité et de vision à long terme. Alors que le pays traverse l’une des périodes les plus difficiles de son histoire récente, la nécessité d’une approche plus inclusive et transparente dans la résolution de la crise financière devient de plus en plus évidente.

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