Riad Salamé sur Al Hadath, 24 mai 2021

Hier soir, le gouverneur de la Banque du Liban Riad Salamé a fêté l’anniversaire du renouvellement de son mandat à la tête de la Banque du Liban avec une interview télévisée diffusée sur les ondes de la chaine Al Haddath. Il y ressortait un gouverneur de la Banque du Liban toujours sur de lui, toujours dans le déni d’une politique économique qui nous a amené à la catastrophe actuelle, qui pense avoir sauver le secteur financier local, sans voir que par ailleurs, cette politique monétaire a été nocive.

Riad Salamé semble avoir oublié les principes mêmes d’une économie, celle qui consiste à la construire par des secteurs productifs et non par la dette jusqu’à la transformer en économie fictive mettant toujours la responsabilité de la situation sur les autorités et dans le déni de la sienne. Il est certain qu’il est dur pour une personne souffrant d’un égo démesuré de reconnaitre ses fautes.

Acteur de la crise, il l’a été indéniablement en ne jouant pas son rôle qui consiste à protéger l’argent à la fois de la Banque du Liban, la plus grande créancière de l’état aujourd’hui, et celle des déposants locaux et étrangers. La situation d’un état de défaut de paiement était inéluctable depuis l’inversion des flux financiers en janvier 2019, chose qu’il ne semble toujours pas admettre. Il est en effet dur d’avoir tort également.

D’ailleurs, faut-il lui rappeler que les difficultés sont apparues dès mai 2019, après que les importateurs d’essence ont eu la plus grande difficulté à se fournir en devises étrangères? Faut-il lui rappeler que les dollars étaient généralement indisponibles au retrait dès l’été 2019, quand l’état de défaut de paiement n’a eu lieu qu’en avril 2020? Il faudrait aussi qu’il révise un peu

La livre libanaise était une monnaie forte, selon lui. Il semble oublier que les modèles d’économétrie montraient plus une livre à 3000 LL/USD dès l’époque et non à 1500 LL/USD. Cette surévaluation a des conséquences sérieuses, comme le fait de limiter la croissance économique pourtant nécessaire, un mal dont souffrait le Liban depuis un certain temps, mais également de détruire les emplois, de pousser d’avantage de personnes à l’exil, un exil qui alimentait encore ce schéma Ponzi qu’il a mis en place sans aussi connaitre ou reconnaitre le syndrome hollandais qu’il amenait, c’est-à-dire à alimenter une surévaluation d’une monnaie par l’exportation d’une marchandise, ici nos matières grises au détriment des autres secteurs productifs, jusqu’à l’effondrement.

Selon lui, le système bancaire a survécu à la crise. Ce son de cloche sonne différemment pour la population libanaise ou encore pour l’étranger pour qui toutes les banques libanaises sont insolvables, y compris la Banque du Liban elle-même, du jamais vu, en raison des opérations d’ingénierie financière qu’il a mené.

Il continue à souhaiter de vouloir susciter l’illusion mais combien de temps peut durer un mirage alors que ces illusions ne durent plus, promettant aux déposants de libérer 50 000 dollars dès juin mais oubliant d’un donner les détails. Il s’agira de 50 000 dollars sur 3 ans et non immédiatement selon les informations actuellement disponibles. Les sommes actuellement disponibles sont d’autant plus insuffisantes que la pression monétaire exercée par la fin du programme de subvention à l’achat des produits de première nécessité pourrait justement asséché plus vite encore les possibles sources de devises étrangères et que donc la parité de la livre libanaise face au dollar devrait continuer à dévisser sauf de flux financiers entrants conditionnés à une aide économique elle même dépendant d’un audit des comptes de la Banque du Liban qu’il a longtemps refusé.

La Banque du Liban peine donc à comprendre qu’au-delà même des comptes bancaires, il y a une question essentielle liée à la survie de la population. De l’argent bloqué sur des comptes bancaires ne permet pas aux gens de vivre et encore moins de manger.

Parler du fait que les banques libanaises ne se soient pas effondrées est ubuesque. Soyons claires, elles sont en faillite tout autant qu’est en faillite la Banque du Liban ou encore l’état libanais lui-même. Elles sont en faillite parce que la Banque du Liban elle-même a échoué à protéger l’épargne de la population et à continuer à financer la dette publique comme elle aurait pu agir. Les paroles, c’est beau, mais les actes sont meilleurs.

Bref, un magicien qui semble manier des mots pour assurer les personnes qui ne connaissent pas la réalité de la situation. Mais à force de promettre l’impossible, plus personne ne fini par le croire.

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