D’Icare à Twitter: allégories contemporaines

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Regardez-les passer ! Eux, ce sont les sauvages.
Ils vont où leur désir le veut, par-dessus monts,
Et bois, et mers, et vents, et loin des esclavages.
L’air qu’ils boivent ferait éclater vos poumons
.

Jean RICHEPIN (1849-1926),
Extrait du poème Les Oiseaux de passage.

« Puis vinrent les oiseaux marins, attirés par les déchets organiques en pleine décomposition […]. Survinrent ensuite les premiers incidents avec des oiseaux quasiment pris dans les réacteurs d’avion et la panique causée par la prolifération sans pareille des oiseaux marins qui ne savent plus où donner de la tête, entre la décharge et le fleuve pollué d’à côté. […] et les mouettes firent irruption dans nos vies de manière assez brutale » écrit Suzanne Baaklini dans L’Orient-le-Jour du 16 janvier 2017. Mi-hitchcockien, mi-eastwoodien, le paysage est bien libanais.

Ce 16 janvier 2017, la direction de la compagnie aérienne MEA prend la décision brutale de mettre fin à la prolifération des mouettes, attirées par les décharges dans le périmètre de l’aéroport de Beyrouth, en les faisant abattre par une armada de chasseurs. Les moyens déployés sont démesurés, les images sont choquantes. Les Libanais sont, une fois de plus, stupéfaits par la monstruosité du crime. Ici, l’homme et l’oiseau sont pris au piège. Crimes et déchets s’accumulent, pourrissent et tuent inéluctablement.

L’oiseau, symbole de liberté absolue, fascine l’homme qui s’est identifié à lui au cours des siècles. Ecrivains, penseurs, chercheurs, artistes ont tenté de conquérir le ciel avec leurs exercices littéraires, leurs expériences scientifiques, leurs recherches plastiques: Ovide dans les Métamorphoses, Fariduddin EL Attar dans La Conférence des oiseaux, Léonard De Vinci dans Le Codex sur le vol des oiseaux, George Edwards dans Histoire naturelle d’oiseaux peu communs, Joan Miro dans Femmes, oiseaux, étoiles et, aujourd’hui, le petit oiseau bleu gazouillant devenu l’icône planétaire, Twitter. Du Japon à l’Argentine, du pôle au Nord à l’Antarctique, mis en cage, abattu ou en plein vol, l’oiseau est indéniablement l’allégorie de la liberté.

D’Icare à Twitter : allégories contemporaines est une exposition de peintures, de sculptures et de photographies d’artistes de la Galerie Alice Mogabgab. Daniel Chompré, Pascal Courcelles, Nancy Debs, Fadia Haddad, Andrée Hochar Fattal, Li Wei, Ludwika Ogorzelec, Emma Rodgers, Takayoshi Sakabe et Jean-Bernard Susperregui déploient leurs ailes d’artistes-oiseaux et offrent leurs idées sur la liberté. Dans un pays où l’homme et l’oiseau sont les proies faciles d’un pouvoir corrompu et assassin, ces artistes défient l’agonie, exaltent la création et chantent l’hymne à la liberté.


Adresse
Rue Ashrafieh
Im. Karam 1er et.
Beyrouth Liban
T. +961 3 210424
www.alicemogabgab.com
[email protected]

La Galerie est ouverte
du mardi au samedi de 10:00 à 19h00.
Exposition jusqu’au 30 juin 2017.

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