Le tribunal devrait rendre une décision dans les prochaines semaines sur l’opportunité d’accepter ou de rejeter la demande des accusés de dégeler leurs avoirs en Europe

La cour d’appel de Paris a tenu mardi une audience dans le cadre de l’enquête en cours contre le gouverneur de la banque centrale libanaise Riad Salamé pour examiner le gel des avoirs que lui et ses proches sont soupçonnés d’avoir acquis grâce à des détournements de fonds massifs de l’institution.

“Nous plaidons aujourd’hui, [en chambre]. L’affaire sera ensuite prise en délibéré”, a déclaré Pierre Olivier Sur, l’avocat de M. Salamé en France.

Le bureau des médias du procureur a confirmé à The National que l’audience avait eu lieu à 14 heures, heure locale, mais a refusé de fournir plus de détails, invoquant une obligation de maintenir le “secret” de l’enquête en cours.

La décision du tribunal d’accepter ou non l’offre des accusés de libérer leurs avoirs gelés en Europe devrait être rendue dans les prochaines semaines.

M. Salamé fait l’objet d’enquêtes dans six pays européens, à savoir la France, la Belgique, le Luxembourg, le Liechtenstein, l’Allemagne et la Suisse.

L’enjeu est de taille : les actifs en question pourraient être vendus et les bénéfices restitués au Liban, au cas où M. Salamé serait condamné et qu’il serait prouvé qu’il a utilisé des fonds publics à des fins personnelles.

À cette fin, en mars, le Liban a déposé une plainte civile contre M. Salamé en France et s’est constitué partie civile dans l’affaire, dans le but de réclamer ces avoirs en tant que partie lésée.

L’avocat représentant l’Etat libanais était présent à l’audience, selon une source proche du dossier.

Cette décision a été contestée du côté de l’accusé. “Nous envisageons une plainte pénale contre l’action civile de l’État pour faux et tentative de fraude, car il manque la signature ministérielle qui authentifierait sa validité”, a déclaré M. Sur au National dans un e-mail après l’audience.

M. Salamé est soupçonné d’avoir détourné plus de 330 millions de dollars de la banque centrale du Liban avec l’aide de son frère, Raja Salamé, et d’avoir utilisé le produit pour acheter des propriétés luxueuses à travers l’Europe.

M. Salamé a toujours nié tout acte répréhensible depuis l’ouverture des dossiers.

La plupart de ses actifs, constitués d’actifs immobiliers et bancaires d’une valeur de plus de cent millions de dollars à travers l’Europe, ont été gelés l’an dernier à la suite d’une importante opération de lutte contre le blanchiment d’argent au Liban.

Cela a été effectué dans le cadre d’une enquête conjointe menée par les autorités judiciaires françaises, allemandes et luxembourgeoises, aboutissant à la saisie d’actifs d’une valeur de 120 millions d’euros (130 millions de dollars) appartenant au gouverneur et à quatre de ses proches.

Anna Kosakova , sa compagne amoureuse, a été mise en examen par la juge française Aude Buresi en juillet pour association de malfaiteurs, blanchiment organisé et blanchiment de fraude fiscale aggravée.

Cette décision intervient dans le cadre de l’enquête ouverte en France, où elle possède au moins 14,3 millions d’euros de biens, désormais tous saisis, selon des documents judiciaires consultés par le National.

“Les ordonnances de saisie rendues par le juge d’instruction sont extrêmement bien motivées. Les demandes de levée de saisie sont réduites à un combat d’arrière-garde et à une opération de communication”, a déclaré William Bourdon, l’avocat des deux parties civiles, le collectif des victimes des pratiques frauduleuses et criminelles au Liban, un groupe de déposants dont les économies sont piégées dans des banques libanaises, et Sherpa, une ONG anticriminalité financière en France.

Article écrit en anglais par Nada Maucourant Atallah et publié sur https://www.thenationalnews.com/mena/2023/04/04/paris-appeals-court-to-examine-riad-salamehs-frozen-millions-in-europe/.

Nada Maucourant Atallah
Nada Maucourant Atallah est correspondante au bureau de Beyrouth de The National, un quotidien de langue anglaise publié aux Émirats arabes unis. Elle est une journaliste franco-libanaise avec cinq ans d'expérience au Liban. Elle a auparavant travaillé pour L'Orient-Le Jour, sa version anglaise L’Orient-Today et le journal d'investigation français Mediapart, avec un accent sur les enquêtes financières et politiques. Elle a également fait des reportages pour divers médias français tels que Le Monde Diplomatique et Madame Figaro.

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