Golfe: Le New-Look saoudien, sous couvert de guerre contre le terrorisme, la normalisation de facto avec Israël

316

Arabie Saoudite

I – Solder l’ùre Bandar.

Sous couvert de guerre contre le terrorisme, l’Arabie saoudite a opĂ©rĂ© un rapprochement tangible avec IsraĂ«l, criminalisant la confrĂ©rie des FrĂšres Musulmans, renouant avec Mahmoud Abbas, dans une tentative de renflouement de la question palestinienne, la grande oubliĂ©e du «printemps arabe», en vue d’accompagner le rĂšglement du conflit israĂ©lo-arabe selon un schĂ©ma amĂ©ricain confĂ©rant un statut minorĂ© au futur Ă©tat palestinien.
Mais la chute de la place forte islamiste de Yabroud en Syrie, le verrou de Damas, aux mains des forces gouvernementales syriennes, le 15 mars 2014, le jour mĂȘme du rĂ©fĂ©rendum du rattachement de la CrimĂ©e Ă  la Russie traduit une exacerbation de la rivalitĂ© des puissances entre le bloc atlantiste et ses adversaires, Ă  l’effet de fausser les plans des AmĂ©ricains et de leurs alliĂ©s saoudiens tant en Syrie que dans l’hinterland stratĂ©gique de la Russie et propulser l’ancien Empire des tsars au rang d’interlocuteur fiable au niveau du Monde arabe, longtemps diabolisĂ© du fait de l’athĂ©isme marxiste soviĂ©tique.
La chute de Yabroud, 10 mois aprÚs le perte de Qoussayr, devrait sécuriser les voies de ravitaillement du Hezbollah libanais et tarir quelque peu le flux djihadiste de Syrie vers le Liban.

Un tel dĂ©veloppement stratĂ©gique, tant sur le plan militaire en Syrie que diplomatique en Ukraine, devrait donner plus d’écho Ă  la retentissante mise en garde de Mahmoud Abbas, dĂ©pitĂ© par le comportement amĂ©ricain : «Ne faites jamais confiance aux AmĂ©ricains. Si vous voulez rĂ©cupĂ©rer vos droits, adressez-vous aux Russes», a lancĂ© le dirigeant palestinien exacerbĂ© par les nouvelles requĂȘtes amĂ©ricaines concernant de nouvelles concessions palestiniennes en faveur d’IsraĂ«l.
Pour le lecteur arabophone, la totalité de cette déclaration sur ce lien: http://www.al-akhbar.com/node/202185

Ni l’offre du Qatar de louer Ă  des prix faramineux les deux bases russes en Syrie, sur la MĂ©diterranĂ©e, ni la proposition mirobolante de Bandar Ben Sultan d’un partenariat Ă©nergĂ©tique entre l’Arabie saoudite et la Russie, -un pacte de non concurrence dans le domaine du pĂ©trole et du gaz, doublĂ© d’un contrat militaire de 14 milliards de dollars-, n’auront eu raison du soutien russe Ă  la Syrie en ce que Moscou a voulu apporter, dans la bataille de Syrie, au-delĂ  des considĂ©rations stratĂ©giques, la preuve de sa loyautĂ© Ă  l’égard d’un pays qui aura Ă©tĂ©, avec l’AlgĂ©rie, le seul alliĂ© arabe fiable en dĂ©pit de l’effondrement de l’empire soviĂ©tique.

Pour le lecteur arabophone, l’offre de Bandar à Poutine: http://www.al-akhbar.com/node/191263
Soldant sans Ă©tat d’ñme l’ùre Bandar, l’ancien patron de la nĂ©buleuse islamiste, la dynastie wahhabite pense avoir dĂ©blayĂ© la voie Ă  la grande rĂ©conciliation saoudo amĂ©ricaine, concrĂ©tisĂ©e par la visite Ă  Ryad de Barack Obama, fin mars, une pĂ©riode correspondant Ă  la reprise des nĂ©gociations irano amĂ©ricaines sur le nuclĂ©aire iranien.

Cette programmation n’est nullement le fait du hasard. Elle paraĂźt destinĂ©e dans l’esprit de Washington Ă  signifier tant aux Saoudiens qu’à leurs alliĂ©s arabes et musulmans, dans l’ordre subliminal, la permanence et la soliditĂ© du Pacte de Quincy (1) en dĂ©pit des fritures dans les relations entre le meilleur alliĂ© des Etats Unis dans le Monde arabe et le protecteur d’IsraĂ«l; en dĂ©pit des tentatives de rapprochement des Etats-Unis avec l’Iran, l’ancien super gendarme du Golfe du temps de Chah et dĂ©sormais la bĂȘte noire de la dynastie wahhabite.

Dans un mouvement de balancier, le royaume saoudien a accordĂ© le grand pardon royal Ă  ses enfants prodiges djihadistes, diabolisant les FrĂšres Musulmans, son ancien pupille, et, dans un ultime cadeau d’un roi octogĂ©naire en phase crĂ©pusculaire de son rĂšgne, le Roi Abdallah (88 ans) a couplĂ© cette dĂ©marche en impulsant une refonte de l’archaĂŻque systĂšme Ă©ducatif saoudien, si prĂ©judiciable Ă  l’image du Royaume, Ă  l’image de l’Islam et Ă  la stratĂ©gie de ses alliĂ©s du bloc atlantiste.
Fait sans prĂ©cĂ©dent dans les annales du Royaume, une dame, Haya Al Sahmary, a Ă©tĂ© nommĂ©e Ă  une fonction d’autoritĂ© au sein de la haute administration saoudienne, Ă  la direction de la formation, en tandem avec le Prince Khaled Ben Faysal, le fils du dĂ©funt Roi Faysal, au poste de ministre de l’éducation, avec Ă  la clĂ© un budget de plusieurs milliards de dollars pour mener Ă  bien cette opĂ©ration.

Au-delĂ  des rivalitĂ©s de voisinage et des conflits de prĂ©sĂ©ance, la diabolisation des FrĂšres Musulmans, la matrice originelle d’Al Qaida et de ses organisations dĂ©rivĂ©es, apparait ainsi comme une grande opĂ©ration de blanchissement des turpitudes saoudiennes et de dĂ©douanement de la dynastie Ă  son soutien Ă  la nĂ©buleuse du djihadisme erratique depuis son apparition dans la dĂ©cennie 1980 lors de la guerre anti soviĂ©tique d’Afghanistan. Un parrainage qui a valu Ă  l’Irak d’assumer, par substitution, la fonction de victime sacrificielle d’un jeu de billard Ă  trois bandes, en 2003, en compensation au chĂątiment de l’Arabe saoudite pour sa responsabilitĂ© dans les attentats du 11 septembre 2001 contre les symboles de l’hyperpuissance amĂ©ricaine.
Cette dĂ©cision Ă  l’encontre d’une confrĂ©rie, qu’elle a longtemps couvĂ©e, qui fut de surcroĂźt son instrument docile dans sa guerre contre les rĂ©gimes rĂ©publicains du versant mĂ©diterranĂ©en du Monde arabe, tĂ©moigne du brutal retournement de situation Ă  l’égard d’une organisation, jadis portĂ©e au pinacle dĂ©sormais vouĂ©e aux gĂ©monies. A l’apogĂ©e de sa puissance au dĂ©but du «printemps arabe», en 2011, l’unique formation transnationale arabe se retrouve Ă  son pĂ©rigĂ©e trois ans plus tard, en butte dĂ©sormais en aux coups de butoir conjuguĂ©s de son pays d’origine, l’Egypte, et de son pays incubateur, l’Arabie saoudite, les deux plus grands pays arabes, le premier par sa puissance militaire, le second par sa puissance Ă©conomique.

La criminalisation des FrĂšres Musulmans a signĂ© d’une maniĂšre spectaculaire l’entrĂ©e en fonction du nouveau patron du renseignement saoudien, le prince Mohamad Ben Nayef, ministre de l’IntĂ©rieur. Elle s’est doublĂ©e, dans la foulĂ©e, de l’inscription sur la liste des organisations terroristes, deux autres de ses excroissances, le Front As Nosra de Syrie et l’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL), et pour faire bonne mesure, deux organisations chiites, les rebelles zaĂŻdites dits Houthis du YĂ©men, et, naturellement, le Hezbollah Libanais, le diable habillĂ© en Prada iranien.

Elle a coĂŻncidĂ© avec le grand chamboulement du personnel diplomatique opĂ©rant sur le front de Syrie avec la mise Ă  l’écart d’une personnalitĂ© majeure du conflit, Robert Ford, le cerbĂšre amĂ©ricain auprĂšs de l’opposition off–shore et l’évacuation sanitaire du prince Bandar Ben Sultan, consĂ©quence des revers du camp atlantiste en Syrie et du dĂ©ferlement djihadiste qui s’en est ensuivi. Il devrait ĂȘtre complĂ©tĂ©, selon toute vraisemblance, par la mise Ă  l’écart du reprĂ©sentant français Eric Chevallier, ancien chargĂ© de mission auprĂšs de Bernard Kouchner.
Un tel ravalement cosmĂ©tique devrait doter les alliĂ©s arabes du bloc atlantiste d’une image bonifiĂ©e et offrir, dans l’esprit de ses ordonnateurs, une meilleure exposition mĂ©diatique Ă  l’opinion internationale en cas de reprise des hostilitĂ©s Ă  grande Ă©chelle en Syrie dans l’hypothĂšse d’un Ă©chec durable de la confĂ©rence de GenĂšve 2; ou en riposte compensatoire au coup de force de la Russie en CrimĂ©e.
Le nouveau patron du renseignement saoudien a d’ores et dĂ©jĂ  pris langue avec un vieux cheval de retour, le gĂ©nĂ©ral Rifa’at Al Assad, oncle paternel du prĂ©sident syrien Bachar Al-Assad, dans une dĂ©marche destinĂ©e Ă  relancer la rivalitĂ© au sein du clan familial entre le bourreau de Hama, en 1982, en exil en Europe, et son neveu.

Cette crise, la plus violente depuis la crĂ©ation du Conseil de coopĂ©ration du Golfe, il y a trente ans, parait devoir entraver le fonctionnement de l’ultime instance rĂ©gionale de coopĂ©ration arabe encore en activitĂ©.
En pointe dans le combat de la contre rĂ©volution arabe, ce syndicat des pĂ©tromonarchies du Golfe, sous haute protection militaire occidentale, parait devoir rĂ©duire sa voilure, non seulement en raison de la guerre entre les frĂšres ennemis du wahhabisme, mais aussi du fait du souci du 6eme membre, le Sultanat d’Oman, de se maintenir Ă  l’écart de ce conflit fratricide, cherchant auprĂšs de l’Iran un contrepoids Ă  la prĂ©Ă©minence du duo saoudo qatariote au sein de cette organisation. Un pont reliant Oman Ă  l’Iran devrait ĂȘtre Ă©difiĂ© via le dĂ©troit d’Ormuz concrĂ©tisant l’alliance scellĂ©e Ă  l’occasion de la visite du prĂ©sident iranien Hassan Rouhani Ă  Mascate, le 12 mars 2014.
FormĂ© des six pĂ©tromonarchies du Golfe, (Arabie saoudite, BahreĂŻn, Emirats Arabes Unis, KoweĂŻt, Qatar, Sultanat d’Oman), le Conseil de CoopĂ©ration du Golfe a Ă©tĂ© mis sur pied dans la dĂ©cennie 1970 au moment de l’accession Ă  l’indĂ©pendance de l’ancienne cĂŽte des pirates, dans la foulĂ©e du retrait britannique Ă  l’Est de Suez. Les six pĂ©tromonarchies abritent chacune une importante base occidentale, faisant de la zone la plus importante concentration militaire atlantiste, hors de l’Otan.
Que le Mufti de l’Otan (87 ans) soit parvenu, au soir de sa vie, Ă  saborder les relations entre les meilleurs alliĂ©s de l’Otan, ses supplĂ©tifs dans la recolonisation du Monde arabe donne la mesure de la fragilitĂ© de cet Ă©difice et de ses adhĂ©rents.

II – Une guerre à outrance sur fond d’un contentieux territorial historique

La rivalitĂ© entre Qatar et l’Arabie est historique quoique feutrĂ©e. Elle remonte Ă  la fondation du royaume wahhabite au dĂ©but du XX me siĂšcle, lorsque le Roi Abdel Aziz, fondateur de la dynastie wahhabite, avait ordonnĂ© le rattachement du Qatar Ă  la province saoudienne d’Al Hassa, faisant de la principautĂ© un dĂ©partement de son royaume. Un contentieux rĂ©solu en 1965 Ă  la suite de fortes pressions de Haut-Commissaire britannique enjoignant aux deux pays de ratifier un accord de dĂ©limitation des frontiĂšres.
Le rebond de la crise rĂ©sulte tant du refus viscĂ©ral de l’Arabie saoudite de cautionner des coups d’état comme mode de changement de rĂ©gime au sein des pĂ©tromonarchies, -comme ce fut le cas Ă  deux reprises au Qatar-, que de la volontĂ© de Doha de se soustraire de la tutelle de l’Arabie saoudite, pesante sur le fonctionnement du Conseil de coopĂ©ration du Golfe. En soutenant les FrĂšres Musulmans, honnis par la dynastie wahhabite et les Houthistes du YĂ©men, le Qatar a exacerbĂ© les tensions entre les deux monarchies.

http://www.al-akhbar.com/node/202041

Les propos «incendiaires» du Mufti de l’Otan, Cheikh Youssef Al Qaradawi, en soufflant sur les braises, ont fait voler en Ă©clat l’accord de rĂ©conciliation signĂ© en dĂ©cembre 2013 Ă  Ryad, entre le Qatar, d’une part, l’Arabie saoudite et les Emirats arabes Unis, d’autre part, en prĂ©sence de l’Emir du KoweĂŻt et donnĂ© une tournure virulente Ă  leur rivalitĂ©.
La mise Ă  l’index des FrĂšres Musulmans tant par l’Arabie saoudite qu’auparavant par l’Egypte devrait fragiliser considĂ©rablement la branche syrienne de la confrĂ©rie, un des principaux vecteurs du combat anti Assad, de mĂȘme que les formations rigoristes sunnites de Tripoli (Nord Liban).

III – Le pardon royal

Indice supplĂ©mentaire du changement de cap de la dynastie wahhabite: L’Arabie saoudite a offert le pardon royal aux djihadistes qui se rendraient dans les ambassades saoudiennes de lieu de leur dĂ©ploiement (Liban, Turquie, Jordanie), et autorisĂ©e leur retour en Arabie saoudite sous condition qu’ils fassent l’objet d’une rĂ©habilitation dans des camps affectĂ©s Ă  cet effet Une mĂ©thode efficace qui permet Ă  l’Arabie de faire plaisir Ă  ses alliĂ©s occidentaux, notamment l’AmĂ©rique et de ficher en mĂȘme temps ces propres djihadistes. Le pardon royal ne concerne toutefois pas les volontaires qui continuent de s’y rendre. Ce systĂšme ingĂ©nieux pour les Saoudiens est vĂ©cu comme un supplice de tantale par les Occidentaux en ce qu’il Ă©ponge une partie des djihadistes tout en continuant Ă  ravitailler en homme le champ de bataille de Syrie et d’Irak
Ryad a ainsi conditionnĂ© la reprise de son aide financiĂšre et matĂ©rielle (armes) Ă  la tribu d’Al Ahmar du YĂ©men, sous rĂ©serve que cette importante confĂ©dĂ©ration tribale, l’une des deux plus importantes du YĂ©men, mĂšne un combat sans relĂąche, non contre «Al Qaida» et les rebelles houthistes qui gagnent du terrain, mais contre
. les FrĂšres Musulmans yĂ©mĂ©nites (soutenus par le Qatar).

IV – Fin de l’amnĂ©sie saoudienne Ă  propos des Palestiniens.

Rompant avec son coma, l’Arabie saoudite s’est Ă  nouveau manifestĂ©e, dĂ©but mars, sur le plan palestinien, le grand oubliĂ© du printemps arabe, s’engageant dans une concurrence mĂ©diatique avec son rival qatariote, envoyant l’un de ses plus flamboyants Ă©missaires mĂ©diatiques Ă  Ramallah, le prince Walid Ben Talal, pour y rencontrer Mahmoud Abbas.

Un message Ă  triple sens, Ă  triple destinataire:

A – Aux Etats Unis et Ă  l’Europe: En missionnant un prince de sang royal, -celui-lĂ  mĂȘme qui a actĂ© publiquement la connivence de fait entre l’Arabie Saoudite et IsraĂ«l, «les Arabes et les sunnites», dans leur combat contre la branche rivale de l’Islam, l’Iran chiite et ses alliĂ©s rĂ©gionaux, la Syrie et le Hezbollah libanais» (2)-, en visite publique en Cisjordanie occupĂ©e pour y rencontrer le prĂ©sident de l’autoritĂ© palestinienne, cela signifie pour un Royaume au langage hermĂ©tique qu’il formalise de facto ses rapports avec IsraĂ«l, en ce que cette visite n’aurait pu avoir lieu sans le blanc-seing des autoritĂ©s d’occupation du siĂšge administratif de l’embryon du problĂ©matique futur Ă©tat palestinien.

B -A l’opinion internationale: Cette visite publique, amorcĂ©e avec les rencontres saoudo israĂ©liens de Monaco, le 10 DĂ©cembre 2013, et de Davos, en FĂ©vrier 2014, tranche avec les visites secrĂštes de l’ancien chef du renseignement saoudien, le Prince Bandar Ben Sultan et constitue un jalon complĂ©mentaire de la convergence saoudo israĂ©lienne. Elle confirme, concrĂštement, une tendance lourde de la nouvelle orientation saoudienne, le jeu Ă  dĂ©couvert sans faux fuyant, qui Ă©tait auparavant la marque de fabrique traditionnelle de la diplomatie saoudienne.

C -Aux Palestiniens et au Monde arabe et islamique: Une visite Ă  Mahmoud Abbas, c’est-Ă -dire au rival direct du chef du Hamas, rĂ©pond indirectement au souci de Ryad de rendre hommage Ă  un dirigeant arabe qui a eu l’ingĂ©nieuse idĂ©e de se maintenir Ă  distance des conflits interarabes et de dĂ©ployer ses «bons offices» auprĂšs des protagonistes du conflit syrien pour favoriser la tenue de GenĂšve II, lui ouvrant ainsi la voie Ă  une audience avec Barack Obama, le 15 mars prochain Ă  Washington.
Au-delĂ  de ses objectifs Ă©conomiques, ce dĂ©placement Ă  forte portĂ©e symbolique, d’un prince de sang royal saoudien avec le consentement israĂ©lien, tĂ©moigne du bouleversement des rapports inter arabes et des rapports entre IsraĂ«l et les pĂ©tromonarchies.
Au regard du prĂ©cĂ©dent qatariote, la visite de l’Emir du Qatar Ă  Gaza et le fiasco qui s’est ensuivi avec le discrĂ©dit qui a frappĂ© le chef politique du Hamas, Khaled Mecha’al se pose la question de l’impact de ce dĂ©placement et la durĂ©e de viabilitĂ© de son caractĂšre «historique» dans un Moyen-Orient furtif et dĂ©rapant.
Les rencontres rĂ©pĂ©tĂ©es avec les dirigeants israĂ©liens de Turki Ben Faysal, le parrain originel d’Oussama Ben Laden durant la guerre d’Afghanistan, dans la dĂ©cennie 1980, tant Ă  Monaco, le 10 dĂ©cembre 2013, avec son ancienne collĂšgue du Mossad Tzipi Livni, chargĂ©e des nĂ©gociations avec les Palestiniens, qu’à Davos, en fĂ©vrier 2014 avec le prĂ©sident israĂ©lien Shimon PĂ©rĂšs, de mĂȘme que le dĂ©placement Ă  Ramallah du prince Walid Ben Talal ont constituĂ© les signes avant-coureurs de cette Ă©volution. De mĂȘme que l’attribution par l’Arabie saoudite Ă  une sociĂ©tĂ© israĂ©lienne la responsabilitĂ© de la sĂ©curitĂ© du pĂšlerinage Ă  La Mecque et de l’aĂ©roport de DoubaĂŻ, le lieu mĂȘme du meurtre du dirigeant militaire du Hamas Al Mabhouh. La maison-mĂšre G4S fournit non seulement des Ă©quipements de sĂ©curitĂ© aux colons dans les territoires occupĂ©s palestiniens, mais participe aux interrogatoires musclĂ©s de dĂ©tenus palestiniens dans plusieurs prisons israĂ©liennes. Dans le monde arabe, elle emploierait 44 000 personnes dans 16 pays, notamment aux aĂ©roports de Bagdad et de DubaĂŻ. Outre l’intĂ©rĂȘt financier de ces contrats, la filiale saoudienne de la sociĂ©tĂ© israĂ©lienne Al Majal G4S peut disposer des relevĂ©s d’identitĂ© de millions de pĂšlerins musulmans, y compris leur photo et leurs empreintes digitales.
A l’instar de son rival du Qatar, la dynastie wahhabite, pour la survie de son trĂŽne, a fait donc le choix d’IsraĂ«l contre l’Iran, pourtant en phase ascendante

sous couvert de lutte contre les FrĂšres Musulmans, dont l’alliance contre nature avec le philo-sioniste Bernard Henry LĂ©vy tant en Libye que dans la bataille de Syrie ne leur a Ă©tĂ© d’aucun secours, de mĂȘme que leur rĂŽle de facteur de nuisance des Etats Unis dans la zone depuis la fin de la 2eme guerre mondiale.
L’histoire retiendra que le poignard dans le dos des FrĂšres Musulmans a Ă©tĂ© plantĂ©, non par de mĂ©crĂ©ants laĂŻcs, ou d’affreux nationalistes arabes, voire mĂȘme d’horribles communistes, mais par un rĂ©gime thĂ©ocratique se rĂ©clamant de la mĂȘme religiositĂ© intĂ©griste qu’eux.
La centralitĂ© de l’islam wahhabite dans la sphĂšre spirituelle musulmane ne saurait souffrir la moindre compĂ©tition. Tel est le message de la dynastie wahhabite aux Ă©ventuels contestataires de son leadership. Autrement dit, «plus religieux que les wahhabites tu meurs»: Telle pourrait ĂȘtre la leçon de cette tragique sĂ©quence en ce que le commerce de la religion peut rĂ©server, parfois, de mauvaises surprises.

Par René Naba

Notes :

1 – Le pacte de Quincy Une relation spĂ©ciale mais de vassalitĂ©:

http://www.renenaba.com/le-pacte-de-quincy/

Le «Pacte de Quincy» a Ă©tĂ© scellĂ©, en fĂ©vrier 1945, sur le croiseur Quincy entre le Roi Abdel Aziz Ibn Saoud, fondateur du royaume, et le prĂ©sident amĂ©ricain Franklin Roosevelt, en route pour Yalta pour le sommet soviĂ©to-amĂ©ricain portant sur le partage du monde en zone d’influence.
Il s’articule sur cinq points
-La stabilitĂ© de l’Arabie Saoudite fait partie des “intĂ©rĂȘts vitaux” des Etats-Unis qui assurent, en contrepartie, la protection inconditionnelle du Royaume contre toute menace extĂ©rieure Ă©ventuelle. Par extension la stabilitĂ© de la pĂ©ninsule arabique et le leadership rĂ©gional de l’Arabie Saoudite font aussi partie des «intĂ©rĂȘts vitaux» des Etats-Unis.
-En contrepartie, le Royaume garantit l’essentiel de l’approvisionnement Ă©nergĂ©tique amĂ©ricain, la dynastie Ibn Saoud n’aliĂ©nant aucune parcelle de son territoire, les compagnies concessionnaires ne seraient que locataires des terrains. Les autres points portent sur le partenariat Ă©conomique, commercial et financier saoudo amĂ©ricain ainsi que sur la non-ingĂ©rence amĂ©ricaine dans les questions de politique intĂ©rieure saoudienne. Le «Pacte du Quincy» s’est rĂ©vĂ©lĂ© ĂȘtre une alliance contre nature entre une puissance qui se veut la plus grande dĂ©mocratie libĂ©rale du monde et une dynastie qui se revendique comme la plus rigoriste monarchie thĂ©ocratique du monde.

2-DĂ©claration de Walid Ben Talal Ă  propos de l’Iran et d’IsraĂ«l http://www.lemondejuif.info/prince-ben-talal-les-musulmans-sunnites-sommes-israel-contre-liran/

ReneNaba
RenĂ© Naba | Journaliste, Ecrivain, En partenariat avec https;//www.Madaniya.info Français d’origine libanaise, jouissant d’une double culture franco arabe, natif d’Afrique, juriste de formation et journaliste de profession ayant opĂ©rĂ© pendant 40 ans au Moyen Orient, en Afrique du Nord et en Europe, l’auteur dont l’expĂ©rience internationale s’articule sur trois continents (Afrique Europe Asie) a Ă©tĂ© la premiĂšre personne d’origine arabe Ă  exercer, bien avant la diversitĂ©, des responsabilitĂ©s journalistiques sur le Monde arabo-musulman au sein d’une grande entreprise de presse française de dimension mondiale.

Un commentaire?

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.