La fortune du Liban s’est faite via le hinterland arabe, et bien avant l’Arabie Saoudite, ce hinterland arabe était constitué par la Syrie, la Jordanie, l’Irak, l’Iran et même au-delà et des échanges avec l’Europe et le Monde. Cette route de la Soie qui existe depuis des millénaires.

Je me souviens d’une rencontre, il y a 30 ans avec un Monsieur d’un certain âge, iranien d’origine arménienne et de confession juive à Paris. Il avait parcouru le Monde, de cet Orient compliqué à la Chine pré-communiste à celle de Mao et de la révolution culturelle. Une de ses principales pertes qu’il a du subir dans sa vie a été causée par le pillage du Port de Beyrouth en 1975. Il y a perdu entre autre 3000 tapis persans et des figurines de jade chinoises hors-prix qu’il destinait à la vente en Europe et à Paris plus particulièrement.

Mais cela ne veut pas dire que l’Arabie Saoudite ou ailleurs et que les échanges avec le Liban permettent aux Libanais de travailler au Liban et d’apporter une valeur rajoutée locale et cela est pour notre perte.

Ce coût est aussi celui de la perte d’une matière grise qui nous est nécessaire dans notre pays même. Ils nous prennent les meilleurs et nous laissent les plus incompétents. Former un ingénieur ou un médecin coûte à l’économie libanaise parfois jusqu’à plusieurs millions de dollars dont elle ne bénéficie pas par la suite en terme de valeur rajouté et pire encore quand elle déstructure notre économie, notamment en imposant des prix élevés par rapport à la main d’oeuvre locale qui n’arrive pas à suivre dans le secteur immobilier. Il s’agit par conséquent d’une perte intangible pour notre économie et au final, il faut démystifier la notion de diaspora bénéfique pour une vision plus factuelle de ses avantages mais surtout aussi de ses inconvénients.

A ceux qui prétendent que l’Arabie Saoudite joue un rôle primordial dans notre économie aujourd’hui. Oui, certes, cela est vrai, 130 000 libanais y travaillent. Mais quel est dans ce cas précis, le coût pour notre économie locale.

Qui plus est, l’Arabie Saoudite n’est pas notre marché et notre accès économique naturel.
En allant plus loin dans notre réflexion, aujourd’hui, il existe un certain d’opportunité avec la reconstruction en Syrie, notamment parce que le port de Lattakieh est militarisé et que celui de Tartous est assez excentré. Les ports de Tripoli et de Beyrouth ont un rôle à jouer et cela l’Arabie Saoudite ne l’accepte pas. Cette opportunité pourrait nous réconcilier avec nos couloirs économiques qu’on a perdu avec la guerre civile et les différents évènements qui ont par la suite suivis, comme la guerre du Golfe ou encore les sanctions contre l’Iran.

Ces pays ont un énorme potentiel économique puisqu’il s’agit aujourd’hui de pays vierges mais avec une économie diversifiée non seulement basée sur le pétrole et une population beaucoup plus importantes, des opportunités dans beaucoup de secteurs dans lesquels le Liban excelle et notamment dans le secteur financier, de la gestion de la reconstruction ou tout simplement technologique. Il y a là un bassin d’emploi dans ses pays mais également au Liban même, beaucoup plus important que ce que représente aujourd’hui la péninsule arabique dans son ensemble.

Cette vision des choses est confortée non pas par des rapports locaux mais un rapport par un département de recherche économique, the Institute of International Finance, ce mardi, qui projette une croissance économique importante au cours des prochaines années avec la réouverture des routes commerciales traditionnelles du Liban au reste du Monde. Ainsi, dans un tel scénario, le taux de croissance économique passerait de 2.2% en 2017 à 3.1% en 2018 avec la réouverture des routes du Hinterland arabe.

Certains font de la politique, jurent par grand dieu, qu’il ne faut pas parler à la Syrie de Bachar el Assad, à l’Irak ou à l’Iran aujourd’hui chiite. Cela ne les empêche pas officieusement de commercer avec ces pays pourtant et je pense en particulier à ces Emirats Arabes Unis, plaque tournante du commerce avec l’Iran, ce qui a l’origine de la fortune de Dubai. L’argent n’a pas d’odeur. Ils veulent simplement empêcher les autres de profiter de cette manne, en les s’insèrant dans un conflit politique alors qu’on parle économie, emploi, substance, maintien d’une population et non exil d’une population, qu’on évoque un Liban connecté à son environnement immédiat et non déconnecté de sa région et connecté sans lien physique avec d’autres comme l’Arabie Saoudite.

Ajoutons en passant à ce pays, qu’il se situe après le peak pétrolier, que ses réserves monétaires se sont effondrées passant de 750 milliards de dollars en 2014 à 450 milliards de dollars aujourd’hui et que cette tendance ne s’arrête pas. Ce pays, économiquement passant, fait parti du passé et il convient de préparer l’avenir et de voir les pays potentiellement capables de remplacer “ce partenaire” devenu fort encombrant par ailleurs.

Pourtant il ne s’agit que de nos débouchés économiques naturels qui permettront à ce que notre jeunesse, notre savoir-faire, notre énergie n’aillent pas faire profiter d’autres économique que la notre. Ce ne semble pourtant pas trop demander que de préparer l’avenir.

1 COMMENTAIRE

  1. Certes. Mais avant de pouvoir être un hub du Levant, il faudrait que les infrastructures soient performantes, et le personnel compétent. Ce n’est pas avec l’aéroport actuel, avec des entrepôts archaïques, les douanes d’un autre âge, ou des structures d’accueil que cela tentera des transitaires sérieux. Quant au port, il y a de quoi rigoler longuement. Et je n’ai pas encore mentionné les routes ( il est rare d’en trouver dans la région en si mauvais état, hors tout standard ou norme), ou le chemin de fer, le mode de transport du futur. La faute à qui ? On revient à l’essentiel : tous pourris, mais alors tous ; et en prime, incompétents et saboteurs.

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