Le Mouvement islamique «Ahrar Al Sham»: Le Front Islamique

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En partenariat avec Al Madaniya – Par l’Institut scandinave des droits de l’homme

Une étude interne de l’Institut Scandinave des Droits de l’Homme (SIHR) sur Le Mouvement islamique «Ahrar Al Sham» «Les hommes libres du Levant).

Adaptation en version française par René Naba, directeur du site www.madaniya.info

III – Le FRONT ISLAMIQUE (observations à propos de ce front).

Robert Ford, ancien ambassadeur des États Unis à Damas, en charge du dossier syrien au département d’état, s’est rendu d’Istanbul à Antioche pour rencontrer spécialement le «Front Islamique» peu de temps après la formation de cette coalition. Cette rencontre préalable avec certains des principaux dirigeants des groupements, préludant à une rencontre officielle avec le Front, a duré plusieurs heures.

Le succès enregistré sur le plan politique et médiatique par le Front islamique, sans pareil parmi les autres groupements opérant sur le champ de bataille de Syrie, est à la mesure de la déconfiture de l’Armée Syrienne Libre, concomitante de l’éclipse se l’armée libre, malgré les efforts incessants des puissances régionales et internationales pour maintenir à flot l’ASL en vue d’en faire le représentant et chef du combat armée contre le régime syrien.

En fait, l’État-major de l’ASL veillait à tenir des propos agréables aux oreilles des «pays amis de la Syrie», mais se retrouvait devant le fait accompli à chacune des opérations conjointes qu’elle menait d’abord avec Jabhat An Nosra, ensuite avec Da’ech.

L’ALS s’est contentée de faire transiter les armes d’une manière directe ou indirecte aux extrémistes, via les formations d’un membre de son État major, comme ce fut le cas à Alep, Idlib, Al Jazira, à Deir Ez Zor, Raqqa, à la périphérie de Hama et du nord de Lattaquieh, enfin d’Al Qalmoun.

L’État-major n’a pu résister longtemps devant la montée en puissance des groupements islamistes pour la simple raison qu’ils constituaient en fait, -de par leur structure et leur orientation salafiste proche de la tendance des Frères Musulmans-, le socle même de l’ALS.

Les services de renseignements du Qatar et de l’Arabie saoudite ont entrepris alors une 3eme opération de synchronisation et de coordination des forces relevant du salafisme djihadiste, après l’échec des deux précédente expériences.

Le FRONT ISLAMIQUE SYRIEN comprenant Ahrar Al Sham, Ansar Al Sham et Liwa Al Haq (division du Droit).

Le FRONT ISLAMIQUE DE SYRIE comprenant Jaych Al Islam, Souqqour Al Sham (les faucons du Levant) et Liwa At Tawhid (division de l’unification).

Le FRONT ISLAMIQUE (dans sa 3me version), s’est constitué le 22 Novembre 2013 par la jonction de huit groupements de deux coalitions islamistes:

  • Ahrar Al Sham
  • Ansar Al Sham
  • Jaych Al Islam
  • Liwa At Tawhid (Division de l’unification)
  • Liwa Al Haq (Division du droit)
  • Souqqour Al Sham (Les Faucons du Levant)
  • Le Front Islamique Kurde
  • Le mouvement Al Fajr (L’Aube).

La fusion des deux Fronts a débuché sur la mainmise du Front Islamique de Syrie sur le Front Islamique de Libération de Syrie. Par sa structure et son contenu idéologique, le nouveau FRONT ISLAMIQUE était plus proche du Front Islamique de Syrie.

Ahrar Al Sham a constitué la colonne vertébrale et le maître d’œuvre de la mise sur pied du Front Islamique Syrien, fondé le 22 décembre 2012. Ce nouveau front était animé de la même mission d’Ahrar Al Sham, la mention «Syrie» en moins, mais en y supprimant l’appartenance nationale syrienne, le Front s’est ainsi substitué à l’ancien Front islamique de Syrie.

Cette évolution sémantique masque en fait les ambitions régionales voire internationales du Front Islamique concernant son objectif à propos du califat et du combat contre les tyrans.

Le Front Islamique a conservé le même mot d’ordre que le Front Islamique Syrien, lequel l’avait déjà emprunté à Ahrar Al Sham. De surcroît, l’émir d’Ahrar Al Sham, Hassan Abboud (alias Abdallah Al Hamawi) a occupé le poste de vice-président du Front Islamique, alors que le Mufti d’Ahrar Al Sham, Abou Al Abbas Al Shami, auparavant Mufti du Front Islamique Syrien, a été reconduit dans ses fonctions au sein de la nouvelle coalition, jusqu’en septembre 2014.

Ahrar Al Sham ne cache pas son appartenance au courant salafiste djihadiste et son rejet de toute législation en contradiction avec la Charia islamique, telle que la Démocratie, le principe des élections et l’institution parlementaire.

Ce qui implique que le Mufti Général dispose de la haute main sur l’encadrement du nouveau Front Islamique selon une conception salafiste djihadiste, d’autant plus que le pacte du Front Islamique proclamait clairement son refus de la démocratie, de la citoyenneté et de la Laïcité., de même que le fait d’assigner à son groupement un objectif suprême: L’édification d’un État Islamique fonctionnant selon la Charia.

La prépondérance idéologique d’Ahrar al Sham a été favorisée par l’absence d’une vision idéologique claire des autres formations de la coalition, dont leurs positionnement évoluait au gré des événements, en fonction des circonstances.

Zahrane Allouche

Zahrane Allouche, chef de Jaych Al Islam (l’Armée de l’Islam) avait adhéré en Août 2014 au pacte spécifiant clairement son objectif l’édification d’un «Califat islamique empreint de sagesse».

Liwa Al Islam (La division de l’Islam) a constitué la colonne vertébrale de cette coalition jusqu’à la constitution d’une «Armée de l’Islam» sous l’autorité de Zahrane Alllouche. Le chef de cette armée alternera les proclamations contradictoires: Son objectif d’édifier «un état fondé sur la justice» ainsi qu’un «État islamique se distinguant du califat». Il se rétractera concernant son objectif de revendiquer l’édification d’un «Califat islamique», à tout le moins a mis une sourdine à cette revendication.

Quant au chef des LIWA Souqqour Al Sham (les Faucons du Levant), Ahmad Abou Issa Al Cheikh, il préconisait au début de la révolution syrienne, l’édification d’un «État civique porteur de valeurs de démocratie et d’égalité et ne s’opposait pas à l’attribution de portefeuilles ministériels à un CHRETIEN», comme en témoigne une vidéo qui a fuité sur la toile sur des propos qu’il a tenus devant une assemblée de ses partisans.

Lors de la mise sur pied du Front Islamique, Abou Issa Al Cheikh s’est rétracté complètement de ses prises de position antérieures justifiant son revirement d’une curieuse façon tant sur la forme que sur le fond.

Sur la forme, Abou Issa a emprunté un curieux procédé: une mise au point par twitter. Sur le fond, son argumentaire ne manquait pas d’originalité: «En ce qui la vidéo, les semeurs de division doivent se rendre compte deux ans après sa production, des étapes franchies depuis cette période. Nous pouvons dire une chose aujourd’hui, puis nous rétracter le lendemain. Il a clos son propos en annonçant l’adhésion de son mouvement à Ahrar Al Sham.

Il a en été de même avec Liwa At Tawhid (Division de l’Unification). 3eme composante du Front Islamique de Syrie, le responsable du mouvement a abreuvé le monde de propos sur la démocratie et l’état laïc. Des discours animés d’un souffle révolutionnaire au point que bon nombre d’observateurs considéraient que Liwa At Tawhid était le bras armé des Frères Musulmans de Syrie.

En fait Liwa At Tawhid n’avait pas de précédentes appartenances quand bien même il avait réussi à attirer des Frères Musulmans et des salafistes.

Un fait révélateur toutefois: le chef législatif de Jabhat An Nosra, Aba Maria Al Qahtani, a juré trois fois sur un tweet assurant que «le chef du Liwa At Tawhid, Abdel Kader Saleh, lui avait révélé avant d’être tué que l’objectif de son groupement était l’édification d’un califat», alors que ce responsable s’était bien gardé de révéler ses intentions auparavant.

ReneNaba
René Naba | Journaliste, Ecrivain, En partenariat avec https;//www.Madaniya.info Français d’origine libanaise, jouissant d’une double culture franco arabe, natif d’Afrique, juriste de formation et journaliste de profession ayant opéré pendant 40 ans au Moyen Orient, en Afrique du Nord et en Europe, l’auteur dont l’expérience internationale s’articule sur trois continents (Afrique Europe Asie) a été la première personne d’origine arabe à exercer, bien avant la diversité, des responsabilités journalistiques sur le Monde arabo-musulman au sein d’une grande entreprise de presse française de dimension mondiale.

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