Abdel Halim Khaddan, ancien vice président de la République Arabe Syrienne, 88 ans, est décédé le 31 Mars à Paris des suites d’une crise cardiaque. Retour sur ce sulfureux personnage.

LE PRÉCURSEUR DANS LA TRAÎTRISE.

En partenariat avec Madaniya.info – À tour seigneur, tout honneur. Abdel Halim Khaddam, le fossoyeur du «printemps de Damas» en 2001, qui vit en exil à Paris depuis près de vingt ans, est un laquais qui porte bien son nom.

Grand dignitaire du régime baasiste sous la mandature présidentielle de Hafez Al Assad (1970-2000), dont il fut le vice-président de la République, Abdel Halim Khaddam est, chronologiquement, un précurseur: le premier dans l‘ordre de la trahison en Syrie, anticipant de six ans le grand basculement vers le mercenariat pétromonarchique de la cohorte des pseudo intellectuels syriens supplétifs avérés des équipées islamo-atlantistes contre leur patrie d’origine.

Pro consul de la Syrie au Liban, durant la guerre incivile libanaise (1975-1990), celui qui présentait un courant nationaliste et laîc du Monde arabe s’appliquera, durant son mandat libanais, non à promouvoir les idéaux du progressisme, du socialisme et de la laîcité dans un pays gangréné par le confessionalisme, mais à consacrer l’affairisme sunnite tant en Syrie qu’au Liban, via son allliance avec le chef du clan saoudo américain au Liban, le milliardaire saoudo libanais Rafic Hariri, et son féal féodal, Walid Joumbllatt, le chef druze du Parti Socialiste progressiste (PSP)

Nullement impressionné par les souffrances et les destructions du Liban, Abdel Halim Khaddam en amplifiera les épreuves et les sacrifices. Il prendra prétexte de la guerre pour transformer le Liban en dépotoir toxique de type Seveso. Une transaction de l’ordre de 80 millions de dollars conclue à l‘époque entre les belligérants supposés, les milices chrétiennes libanaises et le futur transfuge baasiste.

Une transaction juteuse qui a néanmoins contaminé l’espace libanais, particulièrement la chaîne du Mont Liban, déclenchant une prolifération cancéreuse au sein de la population.

LA CAUTION SUNNITE INAMOVIBLE DU POUVOIR ALAOUITE

Abdel Halim Khaddam (Affaires étrangères) et son collègue de la Défense, le Général Moustapha Tlass, auront été les deux cautions sunnites inamovibles du pouvoir alaouite, pendant trente ans. Ces deux personnalités de premier plan, présumées socialistes du régime baasiste céderont finalement aux sirènes des pétrodollars saoudiens, avant de se désintégrer.

Le militaire laissera convoler sa fille Nahed, une belle tige de la société syrienne, vers le septuagénaire marchand d’armes syro-saoudien Akram Ojjeh, avant de sombrer dans le comique d’un problématique doctorat universitaire parisien.

Son fils Firas ralliera l’opposition syrienne off shore pétromonarchique, ponctionnant le cimentier franco suisse Lafarge Holcin pour s’assurer la protection de Daech dans le Nord de la Syrie.

Abdel Halim Khaddam, lui, en diplomate laïc, versera dans l’affairisme Haririen et l’intégrisme religieux des «Frères Musulmans», avant de se carboniser.

Détail piquant: Que l’homme en charge du dossier libanais en Syrie pendant trente ans, celui-la même qui était craint par les diverses factions libanaises et redouté par les chancelleries arabes et occidentales, qui tonnait la foudre et ordonnait les accalmies, à ce titre responsable au premier chef des dérives syriennes au Liban, particulièrement de la corruption, que cet homme là donc soit promu comme sauveur suprême de la Syrie et du Liban, laisse rêveur.

Pis dans le but de complaire aux Saoudiens, Abdel Halim Khaddam plaidera auprès du président Assad la nécessité d’autoriser Rafic Hairi à mettre la main sur le centre ville de Beyrouth pour une bouchée de pains (75 millions de dollars), en vue de déblayer les destructions et édifier à la place de luxueux immeubles, valorisant la fortune de Hariri, d’un coup, de 7, 5 milliards de dollars. Le centre Beyrouth est désormais le socle de la puissance financière du clan Hariri, qui en font un élément incontournable de la vie politique libanaise ..AU PROFIT DE L’ARABIE SAOUDITE.

Un tel comportement révèle l’absence de perspicacité des décideurs arabes, en même temps que leur cécité politique.

Ci joint la déposition de Jamil Al Sayyed, ancien Directeur Général de la sûreté générale libanaise devant le Tribunal Spécial sur le Liban (tribunal Hariri) le 6 juin 2018, sur le rôle corrupteur de Rafic Hariri et le rôle d’Abdel Halim Khaddam pour l’attribution à son coreligionnaire sunnite du projet SOLIDERE, sur ce lien.

DE LA CORRUPTION COMME MODE DE GOUVERNEMENT

Outre Abdel Halim Khaddam et Moustapha Tlass, un troisième larron, le général Ghazi Kanaan, commandant des 30.000 soldats syriens au Liban, ont constitué les trois plus belles prises de guerre du tandem Hariri Siniora, en application de la «diplomatie du carnet de chèques», maniée de tous temps par les Saoudiens pour restaurer le pouvoir sunnite tant à Beyrouth qu’à Damas. Mais la déconfiture de ses trois symboles a ainsi démontré l’indigence et le manque de consistance des protagonistes et du maître d’oeuvre saoudien de cette politique.

Abdel Halim Khaddam se retrouvera relégué aux oubliettes de l’histoire lâché par tous, y compris par ses nouveaux alliés, l’organisation des «Frères Musulmans», celle là même qui s’était lancée à l’assaut du pouvoir, en Février 1982, en vue de faire trébucher le régime baasiste dont il était un des piliers, à quatre mois de l’invasion israélienne du Liban.

Sur la responsabilité d’Abdel Halim Khaddam dans l’échec du printemps arabe, ce lien:

Khaddam reniera singulièrement son militantisme après avoir abusivement ponctionné le Liban, opérant par cupidité la plus retentissante reconversion de l’histoire politique récente, finissant sa vie en factotum de son coreligionnaire sunnite libanais Rafic Hariri.

Cf le lien du fastueux mariage de la petite fille d’Abdel Halim Khaddam à l’0péra de Paris (Palais Garnier), en novembre 2017, aux frais des contribuables libanais et syriens qu’il a outrageusement ponctionné; indice des graves préoccupations sociales de ce grand humaniste protégé de la France.

Quant au Général Ghazi Kanaan, chef des services de renseignements syriens au Liban pendant vingt ans 1982-2004 et commensal régulier de Rafic Hariri, il s’infligera, lui, la sanction de sa forfaiture à son bureau de ministre de l’intérieur syrien pour avoir favorisé, en contrepartie d’une gratification de 800 millions de dollars, la naturalisation libanaise de plusieurs dizaines de milliers de sunnites, en vue de valoriser la comptabilité démographique de la 3me grande communauté libanaise.

Déployés dans la plaine de la Beka’a, ces naturalisés serviront de vivier aux groupements terroristes islamistes Jabhat an Nosra et Daech, lors de la guerre de Syrie (2011-2018), conduisant le Hezbollah à mener six offensives victorieuses contre les terroristes islamistes en vue de pacifier la zone et de préserver le Liban de leurs attentats suicides.

Sur ordre de ses supérieurs, l’ancien vice roi du Liban se donnera la mort, le 12 octobre 2005, se soustrayant du coup à sa comparution devant le Tribunal Spécial sur le Liban chargé de juger les assassins de son soudoyeur.

L’ASSASSINAT DE RAFIC HARIRI, LA PISTE KHADDAM GHAZI KANAAN

Luxe suprême de perfidie, Abdel Halim Khaddam a même été soupçonné d’avoir trempé dans la conjuration visant à liquider son bienfaiteur, tant sont légendaires et sa fourberie et sa cupidité.

Le journaliste Richard Labévière, à l’expertise reconnue sur le Moyen Orient, soutient que Rafic Hariri, «l’ami de Jacques Chirac avait été vraisemblablement tué par des Syriens, certes, mais pas par ceux que l’on croit».

«A la mort d’Hafez Al-Assad, Abdel Halim Khadam est devenu président par intérim du 10 juin au 17 juillet 2000, puis vice-président avant de faire brusquement défection et de s’installer avec sa famille à Paris.

Plusieurs sources autorisées soupçonnent ce grand dignitaire sunnite d’avoir préparé un coup d’État contre Bachar avec l’aide de Ghazi Kanaan et de plusieurs généraux de l’armée syrienne…«Avec l’appui de plusieurs services étrangers, ce cercle pro-saoudien aurait monté l’assassinat de Rafic Hariri, persuadé qu’un tel événement permettrait le renversement de Bachar al-Assad et leur prise de pouvoir», écrit Richard Labévière.

Amplement gratifié de sa forfaiture d’un somptueux cadeau, -la résidence du nabab pétrolier grec, Aristote Onassis, sur la plus célèbre artère de la capitale française, l’Avenue Foch—le renégat Khaddam devra livrer bataille devant la justice française afin de se maintenir dans les lieux, alors que son pendant français, l’ancien président Jacques Chirac avait droit à un appartement avec vue sur Seine Quai Voltaire à Paris.

Judas a trahi son Seigneur pour trente deniers. D’autres trahisons valent certes leur pesant d’or mais accablent le renégat d’un discrédit pour l’éternité. Et pour le bien nommé Khaddam, -dont le patronyme en arabe signifie littéralement «le laquais»-, le titre peu envié de «Grand Commandeur dans l’ordre de la Chevalerie de la traîtrise».

Pour l’édification du lecteur et des générations futures, ci joint la liste non exhaustive des Judas de Syrie.

ILLUSTRATION

Abdel Halim Khaddam – © John Thys (AFP)

TRADUCTION

L’adaptation en version arabe a été assurée par Sana’a Yazigi Khalaf, enseignante Paris

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