Avant de commencer la rédaction de cet article, j’ai déjà imaginé la réaction de certains homos libanicus sortir une perle du genre « nous ne sommes pas à une catastrophe près »… ce genre d’espèces ricanant au son abominable de leur narguilé lorsqu’ils entendent parler culture qui pullulent dans les cafés ridiculement huppés, et qui ne sont prêts à bouger d’un iota ni leurs panses ni leurs croupes pour faire cette révolution que personne n’a encore eu le cran de déclencher. Cette attitude destructrice et morbide qui a laissé passer avec un passif laisser aller toutes les horreurs possibles qui nous ont menés au fin fond d’un abîme funeste.

Il est vrai, avec la crise des déchets organiques, chimiques et même politiques – cette crise qui s’enlise jour après jour et transforme le pays en grosse fosse commune où nous nous transmuons tous en fossoyeurs qui creusent volontairement et apathiquement leur propre tombe – tout est vanité. Nous sommes dans un pays où nous inhalons notre propre mort à cause de notre absence de citoyenneté et d’appartenance à une nation.

Nous nous sommes tous mis d’accord de ne jamais être en accord avec l’autre, celui qui est censé être notre confrère avec qui nous partageons ce petit lopin de terre que nous défigurons à chaque seconde que Dieu nous accorde. Le chaos ? C’est notre fief. La corruption ? Notre état d’âme. L’inertie ? Notre douce symphonie qui paralyse tout espoir d’essor possible. Le vandalisme ? Notre sport national.

Vandalisme sur le site archéologique de Faqra. Photos Serge Akiki.

Vandalisme, un mot que l’on sait très bien mettre en action, alors que quand il s’agit d’action au moment et à l’endroit propice, nous brillons … par notre absence. Un exemple tout frais, tout nouveau, tout beau ? En voici en voilà.

Le village de Kfardebian s’est réveillé hier et a vu rouge… c’est le cas de le dire, au propre comme au figuré. Des ignares qui malheureusement savent lire et écrire, ont eu le culot de marquer à la bombe rouge leur « amour » en Haute Définition (HD), cette passion dégénérée et inculte sur les pierres antiques de la tour du site archéologique de Faqra.

Vandalisme sur le site archéologique de Faqra. Photos Serge Akiki.

Aucun mur en béton qui ravagent à foison tout le paysage du littoral jusqu’au plus haut des monts du Liban n’a éveillé l’intérêt de ces barbares pour déclarer leur idylle. Non, il a fallu des ruines de l’époque romaine, dans le genre inscrit sur la liste indicative du patrimoine de l’Unesco pour assouvir la toquade des tarés. Vu que les interprétations concernant la fonction de la Tour de ce site archéologique restent floues, un iconoclaste alphabète a décidé de faciliter la tâche aux archéologues en datant les pierres et en leur attribuant une nouvelle fonction : le support pour déclarer ses passions.

Vandalisme sur le site archéologique de Faqra. Photos Serge Akiki.

Réjouissez-nous, chers compatriotes, d’avoir parmi nous des gens qui agissent, des gens qui ont du courage, qui participent en toute conscience à l’essor scientifique au pays. Réjouissons-nous d’avoir encore des personnes lettrées, tellement lettrées qu’elles ne savent plus où écrire, et qui nous aident à résoudre nos problématiques historiques en effaçant petit à petit nos marqueurs historiques. N’ayez craintes, notre Etat veille et leur prête main-forte, en employant les personnes convenables au poste convenable, en s’assurant que les gardiens veillent au grand projet national qui se réalise jour après jour, à l’issue de nos guerres fratricides et nos reconstructions « mémoricides » : la disparition de notre identité sous les ruines de la corruption et à coups de fumées de la société « narguilovore », grâce à la magnifique espèce de l’homo sapiens sapiens libanicus.

Marie Josée Rizkallah
Marie-Josée Rizkallah est une artiste libanaise originaire de Deir-el-Qamar. Versée dans le domaine de l’écriture depuis l’enfance, elle est l’auteur de trois recueils de poèmes et possède des écrits dans plusieurs ouvrages collectifs ainsi que dans la presse nationale et internationale. Écrivain bénévole sur le média citoyen Libnanews depuis 2006, dont elle est également cofondatrice, profondément engagée dans la sauvegarde du patrimoine libanais et dans la promotion de l'identité et de l’héritage culturel du Liban, elle a fondé l'association I.C.H.T.A.R. (Identité.Culture.Histoire.Traditions.Arts.Racines) pour le Patrimoine Libanais dont elle est actuellement présidente. Elle défend également des causes nationales qui lui touchent au cœur, loin des équations politiques étriquées. Marie-Josée est également artiste peintre et iconographe de profession, et donne des cours et des conférences sur l'Histoire et la Théologie de l'Icône ainsi que l'Expression artistique. Pour plus de détails, visitez son site: mariejoseerizkallah.com son blog: mjliban.wordpress.com et la page FB d'ICHTAR : https://www.facebook.com/I.C.H.T.A.R.lb/

1 COMMENTAIRE

  1. homo sapiens libanicus. That’s exactly what I keep repeating. I approve. I have no doubt, that they will REMAIN at this stage…. forever.

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