Depuis l’annonce par le gouverneur de la Banque du Liban du passage de la parité de la plateforme électronique Sayrafa à une 90 000 LL/USD après un plus bas historique de 143 000 LL/USD, il y a à peine quelques semaines, puis à 88 000 LL/USD tout juste hier, la parité de la livre libanaise au marché noir est repassée sous le seuil symbolique des 100 000 LL/USD amenant à de nombreuses interrogations.

Cette tendance baissière du dollar face à la livre libanaise pourrait effectivement s’expliquer par l’injection quotidienne de 80 millions de dollars en moyenne ces derniers jours contre 20 millions précédemment. La BdL mobilise massivement ses réserves monétaires, des réserves pourtant bien entamées et qui sont aujourd’hui constituées des droits de tirage spéciaux du FMI mais surtout des réserves obligatoires, derniers dépôts encore disponibles des déposants libanais, les passifs des banques privées dépassant les actifs, comme le soulignait le dernier rapport de mission du Fonds Monétaire International au risque d’entrainer le Liban dans une crise sans fin.

Au rythme actuel des dépenses de la BdL, de nombreuses interrogations sont légitimes, notamment sur la durée de cette intervention mais aussi de son coût. Il est fort à parier que le gouverneur de la BdL, Riad Salamé, qui avait fait cette annonce portant sur le relèvement de Sayrafa la semaine même de son interrogatoire par des enquêteurs européens dans le cadre d’accusations de détournements de fonds, tente ainsi, après plusieurs années de crises multiples mais surtout d’une crise financière ayant mené à l’annihilation de la classe moyenne, avec 90% de la population vivant désormais sous le seuil de pauvreté et une livre libanaise qui a perdu 98% de sa valeur, tente ainsi, après 30 ans de règnes de redonner un blason bien terni.

Après Riad Salamé, le déluge

La fin de son mandat approche. Celui-ci devrait ainsi s’achever le 1er août prochain, sans qu’aucun successeur n’ait été nommé. Il est fort à parier que personne ne prendra le risque de vouloir nettoyer les écuries d’augeas qu’est devenue la banque centrale libanaise. Si cette politique monétaire se poursuit durant les 4 mois qui lui reste, elle pourrait couter à la BdL 9 milliards de dollars, alors que ses réserves monétaires seraient de 10 195 millions de dollars selon les chiffres publiés en janvier dernier.

Pourtant, de nombreux responsables comme le vice-premier ministre Saadeh al Chami dans une tribune libre publiée par le quotidien Nidaa al Watan ou des observateurs économiques notent les risques d’hyper-inflation qui pourraient alors se produire, jusqu’à comparer la situation actuelle du Liban à celle de la république de Weimar après la 1ère guerre mondiale. Faute de réserves monétaires suffisantes, faute de l’application du plan du FMI, nécessaire au déblocage de l’aide internationale même en cas d’élection présidentielle comme le souligne la communauté internationale à juste titre, fatiguée par les promesses vaines déjà formulées lors des conférences Paris II et III, l’économie libanaise ne pourra être réactivée sans flux massif de devises étrangères.

Une condition qui est bien loin d’être remplie aujourd’hui… en raison de la résistance du deepstate à toute réforme financière comme la restructuration du système bancaire, économique comme la mise en place d’une économie non rentière basée sur des industries locales et non des agences exclusives, fiscales notamment en faveur des personnes vulnérables qui souffrent de la crise économiques et en raison de la résistance de ceux qui bénéficient jusqu’à aujourd’hui des multiples taux de change et enfin politiques, avec le règlement de la question de gérance publique pour un état de droit et non un état où le droit ne peut s’appliquer comme le démontre aujourd’hui la résistance d’intérêts face à l’accumulation pourtant de preuves quasi-irréfutable d’enrichissement personnel.

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