Le Akkar est une région montagneuse du nord du Liban, limitrophe de la Syrie et bordée à l’ouest par la mer Méditerranée.
Autrefois un simple district du Nord Liban, il est devenu à la fois un district et un gouvernorat suite à une loi en 2003. En 2014,un gouverneur est nommé en la personne d’Imad Labaki mais la transformation est incomplète en 2017.
Son chef-lieu est Halba.
Il est divisé en 7 parties:
- Qaitea,
- Jouma,
- Dreib,
- Jabal Akroum,
- Wadi Khaled,
- Cheft
- et As-Sahel.
La population est estimée à 389899 habitants dont 106935 réfugiés syriens et 19404 palestiniens, concentrés dans la région de Nahr El Bared selon le Haut Conseil des Réfugiés.
Elle est composée de musulmans sunnites avec d’importantes minorités chrétiennes,principalement des grecs-orthodoxes. Les Maronites forment la seconde minorité chrétienne ainsi qu’une petite minorité grecque catholique. On trouve aussi la plus grande proportion de musulmans alaouites du Liban,ainsi que des populations turques, concentrées dans les villages de Kouachra et Aydamun.
Malgré sa diversité religieuse et ethnique, c’est une des régions les plus pauvres du Liban (63% vivant sous le seuil de pauvreté) et souffre de problèmes que les municipalités locales doivent affronter : coupure d’eau et d’électricité,manque d’accès à l’éducation et au logement, ainsi qu’un manque de gestion des déchets et des eaux usées aggravés par le conflit syrien par l’arrêt des échanges ainsi que l’afflux massif des réfugiés syriens provoquant des tensions entre la population locale et ces derniers.
Elle est aussi témoin de la bataille de Nahr El Bared en 2007 entre l’armée libanaise et l’organisation salafiste Fatah El Islam ainsi que d’attentats dont un dans le Wadi Khaled coûtant la vie à un officier et au passage,un nombre important de militaires au sein de l’armée viennent du Akkar).
En dépit de tous ces problèmes, le Akkar possède une magnifique nature, des vallées à couper le souffle, des sites archéologiques impressionnants, des forêts uniques au Liban ainsi que de très beaux villages, due en partie au fait qu’elle est épargnée du «progrès»,ayant ravagé Beyrouth et le Mont Liban. Son caractère rural favorise l’agriculture,pilier de l’économie dans la plaine de la région, à l’ouest,et est considérée comme la seconde plus grande plaine du Liban, derrière la Békaa.L’Est, quand à lui est plus sauvage et montagneux.
Voici les lieux à voir dans la région en road trip.
1-Tell Arqa :
Arqa,un village sunnite situé près de Miniara, à l’ouest du Akkar, possède un site archéologique particulier avec des vestiges datant du Néolithique et du Bronze Ancien.
Du nom d’Irqata ,elle est mentionnée dans les lettres de Tell Amarna,dont des missives écrites par les anciens de la cité pour solliciter le pharaon d’Égypte Akhenaton de son aide contre les assauts des Apirous,peuple du Croissant Fertile,dans les lettres assyriennes ainsi que dans la Bible (Et plus précisément L’Ancien Testament).
Sous l’Empire Romain,elle est nommée Arcs Caesarea ou Arca,et serait le lieu de naissance de l’Empereur Sévère Alexandre en 208. Pendant les croisades,elle est disputée entre les croisés et les chefs musulmans. En effet, c’est une place stratégique pour contrôler les routes reliant Tripoli à Tartous et Homs.
Puis,elle est reprise par Baybars,un sultan mamelouk,en 1266,au moment de l’effondrement du comté de Tripoli.
2- Forteresse de Gibelacar
Situé près de Akkar El Atiqa,à l’est de la région, c’est un château situé à un éperon de 700 mètres, dominant la vallée entre deux gorges,et contrôlait le passage de Tripoli et de la Békaa vers Homs et permet de protéger la plaine d’Arqa de l’irruption des musulmans et de prévenir une coupure des communications entre Tartous et Tripoli aux temps des Croisades.
Il aurait été construit aux alentours de l’an 1000 par une personnalité appelée Muhriz Ben Akkar(qui a même donné son nom à la région) et reste propriétaire de la famille jusqu’en 1019, prise par le calife fatimide,Al Hakim Bin Amr Allah,puis par les croisés en 1109 par le comté de Tripoli,Bertrand de Tripoli . Elle est capturée ensuite par le sultan zengide Nur ad-Din lors de ses campagnes en Syrie. Après elle est parvenue à être prise par les croisés en 1170.
Amaury 1er,roi de Jérusalem,la remet aux Hospitaliers et fera partie de la seigneurie de Nephin pour revenir au comte de Tripoli Bohémond IV en 1202.Finalement en 1271,Baybars y met le siège devant la forteresse qui finit par capituler après la prise du krak des chevaliers en Syrie.
Au XVIIème siècle,sous l’Empire Ottoman,le clan Sayfa,d’origine kurde et importé par les Mamelouks et régnant dans le Akkar, possède le château et est partiellement détruit par Fakhreddine II en représailles de l’attaque de Sayfa à Deir el Qamar,quand l’émir druze était en exil à Toscane,en Italie,chez les Médicis.Après détruit le château,l’émir emporta des pierres à Deir El Qamar.
Du château,il ne reste que la tour nord.
Il fallait une échelle pour atteindre cette porte située trois mètres au dessus du sol et dont une partie est reconstruite par Baybars,dont des pierres où sont sculptés des lions,emblèmes de la famille,en témoignent.Mais ça offre un magnifique panorama de la région.
Le village de Akkar El Atiqa,quand à lui, possède une chute d’eau de 160 mètres,une merhab historique, des arcades du temps des Mamelouks,reste d’une vieille mosquée de la même époque,l’église byzantine de Ghazarta à l’extérieur du village,,le voisinage de Zabboud, nommé d’après la source d’eau du même nom,connu pour ses sources d’eau,ses collines,Mazraat Zabboud,dont les habitants sont chaleureux,ainsi qu’un sarcophage cananéen méticuleusement placé dans les rochers.
De plus,il y a une forêt de sapins «Ghabat el chouh»
3-Menjez
Ce village, situé à la frontière entre le Liban et la Syrie tire son nom d’une famille franque «El Guise»,qui s’est installée dans la région au temps des croisades,il est d’ailleurs censé porter le nom de «Mont Guise»,mais comme il n’y a pas de synonyme phonétique dans la langue arabe,il a dérivé vers «Menjez».
Une autre source affirme qu’il viendrait du syriaque «Magnéz» signifiant «trésor caché».
Le village est caractérisé par sa pierre basaltique noire,typique de la région et conférant un aspect insolite au Liban ainsi que d’importants sites archéologiques :
- un château croisé,construit par la famille El Guise (Qalaat Felis ou le Félicium),
- un couvent construit par les Jésuites au XIX ème siècle avec son église Saydat el Qalaa,«Notre Dame de la forteresse»,
- le temple Maqam el Rabb (ou Beit Jaalouk) en pierre basaltique noire,le seul au Liban,dédié à Némésis, déesse de la Vengeance,que les autorités romaines en difficulté à l’époque auraient autorisé le culte à la population locale
- ainsi que 87 dolmens mégalithiques marquant l’emplacement de tombes historiques datant d’environ 3000 av J.C .
Il y a aussi les vestiges des aqueducs de Zénobie ainsi qu’une forêt «Horsh el Assouad» de 485000 m² où poussent le laurier et le chêne.On peut même contempler le Nahr El Kebir, frontière naturelle entre le Liban et la Syrie.
4-Beino
Du syriaque,«Beit Youno», faisant référence au dieu romain Jouno,ce village, fondé en 1640,a souffert du joug ottoman et contraint beaucoup à l’exil,et dont les bâtisseurs du village proviennent du Hauran, plateau situé au sud ouest de la Syrie.
Mais malgré son histoire, Beino est un magnifique village avec de grandes maisons luxueuses au style ancien,des ruelles ornées de jasmin,d’arbres fruitiers et de jardins soigneusement entretenus côtoyant des églises,dont l’église de Saint Tadros (Saint Théodore), l’église Mar Sarkis et Bakhos(Saint Sarkis et Bacchus) et l’église Mar Berbara (Saint Barbe),construite sur les restes d’un temple païen et les petits palais en pierre.
Mais ce n’est pas tout:Il y a aussi une réserve naturelle de 100000 m², créée par Issam Fares,le mécène milliardaire originaire du village et abritant des gazelles,des cerfs,des oiseaux rares et d’autres animaux ainsi qu’un lac artificiel pour observer de grosses carpes.
5-Al Qobayat
D’origine syriaque «Qabyoto» signifiant «citernes», dû à sa grande richesse en eau, c’est l’un des plus grands villages du Akkar. Il abrite des vestiges archéologiques remontant à la Préhistoire avec un cimetière datant de 3000 av J.C et témoignent du passage des civilisations phénicienne,romaine, byzantine et arabe.
Il a aussi un important patrimoine religieux :
- Des églises comme la miraculeuse Saïdet el Ghessalé (Notre Dame des lessiveuses) et l’église des 40 martyrs,des vieux sanctuaires comme celui de Mar Elias (Saint Élie) et de Mar Challita (Saint Arthème),
- des monastères comme celui de Mar Doumit (Saint Arthème),construit par les pères carmélites en 1836 sur les restes d’un temple romain et possédant un musée d’animaux empaillés de la région, et une énorme collection de papillons,de fossiles et de vieilles voitures.
Il y a aussi la croix de Kobayat d’une hauteur de 40 mètres et est considérée comme une des 20 plus grandes croix du monde. Le village possède aussi une ancienne magnanerie de 1862,un ancien moulin et plein d’autres sites.
6-Karm Chbat
À 40 minutes de Kobayat,une forêt transformée en réserve naturelle mérite la visite. Ce superbe endroit est composée de sapins de Cilicie,de cèdres et de genévriers. Cette forêt,et plus précisément les sapins de Cilicie,ont été exploités par les Anglais pendant la Seconde Guerre Mondiale pour son bois permettant de construire les chemins de fer reliant Tripoli à Haïfa.
Il existe un chemin qu’empruntaient les Anglais pour transporter le bois(Tariq El Engliz).
En vous promenant, à 1600 mètres,vous pouvez trouver une stèle babylonienne de Nabuchodonosor, datant de 550 avant J.C .
7-Qammoua
Cette immense forêt (dont fait partie Karm Chbat) contient plusieurs espèces d’arbres : genévriers,sapins de Cilicie qui est dominant, chênes, cèdres et pins. C’est un endroit magnifique pour faire une randonnée et très riche en eau,dont le nom vient de «Emaa» qui signifie «entonnoir» filtrant l’eau et se distribue dans les sources d’eau de la région.
On trouve aussi des rochers datant de plusieurs millions d’années.
8-Ghabat El Azar
Cette forêt de chênes chevelus,situé près de la localité de Fneideq,ressemble beaucoup aux forêts en Europe ou au Canada et est unique en son genre au Liban. On peut la visiter tout au long de l’année,mais c’est en novembre que les chênes chevelus prennent leur feuillage doré et que ça devient magique. Malheureusement, cette forêt, millénaire, est passée de 1500000 d’hectares à 1000000 d’hectares en raison de l’abbatage illégale d’arbres.
Mais bonne nouvelle,elle sera une réserve naturelle.
9-Ayoun el Samak
Situé dans la Wadi Jhannam (La vallée de l’Enfer) entre le district de Denniyeh-Minieh et celui du Akkar,la zone montagneuses contient des chutes d’eau et d’un magnifique lac, d’ailleurs idéal pour un pique-nique ou une promenade.
10-Les grottes
Il y a aussi des grottes dans le Akkar, comme la grotte de Nab El Keif à Hoeich,la grotte de Mechmech ou encore celle de Akroum.
11-Akroum
En parlant de Akroum,cette région est connu pour ses sites archéologiques :en gravissant une forte pente de la colline dominant le village (Jabal El Hussein),on trouve deux temples romains,tous deux accolés et dont un est bien conservé,de nombreux fragments de corniches,de chapiteaux corinthiens et moulures ainsi qu’une grande église byzantine dédiée à Saint Samson le Fort.
Dans la Wadi es Sabaa(la vallée du Lion) on trouve deux stèles néo babyloniennes dont l’une représente un personnage tourné à droite face à un lion sur ses pattes arrières. De plus,le village d’Akroum est témoin du passage de moults civilisations dont les Phéniciens et les Romains.
12-Tombe de Wadi Qarghaya
Deux tombes seraient identifiées dans cette vallée. Des os et de la poterie seraient mis à jour datant des ères phéniciennes et romaines. Il mérite les fouilles et selon les archéologues,il pourrait être prometteur pour la culture.
13-Château de Taibo
Localisé sur la montagne à l’est du village de Magdal les experts ont découvert des traces de silex, de bols vitrés jaunes et verts et d’autres objets.Tout comme la Wadi Qarghaya, il mérite l’attention du gouvernement et permet la promotion du patrimoine et de la culture.
14-Kouachra
Ce village turcophone, connu pour son lac impressionnant,se distingue par les murs de ses maisons et ses rues datant de l’Âge de fer,de l’ère romaine, byzantine et islamique et plusieurs types de très vieilles poteries et verres ont été trouvés datant des mêmes époques mentionnées.
15-Aandaqet
Ce village,près de Menjez, possède aussi des sites historiques :Les restes d’une fabrique de soie d’Al Cassini,un Italien ayant marié une Libanaise et installé au Liban,l’église Mar Challita (Saint Arthème), les restes de l’église Saint Éliane dans la vallée de Wadi 3oudine, les restes de l’église Saint Saba, 4 anciens moulins et d’autres sites . D’ailleurs,dans la vallée d’Aoudine,on a trouvé des ruines romaines et byzantines dont trois églises et des tombes.
16-Beit Mellat
Ce village maronite contient un ancien moulin datant de l’ère Ottoman et est en ruine,3 églises : L’église Mar Semaan avec un vieux hêtre, côtoyant une cathédrale en construction, l’église Notre Dame et l’église Saint Joseph,et des villas, appartenant aux Libanais expatriés au Mexique.
Le village tiendrait son nom du syriaque «Beit milleta», signifiant «maison de l’ordre» car c’est ici qu’on amassait les impôts et se tiendrait des réunions publiques importantes.On peut aussi voir dans certaines maisons des traces de brûlures, car durant les évènements, les Palestiniens auraient brûlé le village et la population contraint de se déplacer.Autour du village se trouve une magnifique nature, dont on peut voir quelques pins et des chênes.
17-Berqayel
Ce village se caractérise par les restes du château Zabboud bek abd el Rezzak,la maison de Mohammad Ali Omar et la mosquée de la localité datant de 1190 de l’hégire18-Bqerzla:Ce Village est caractérisé par des chutes d’eau avec un restaurant qui mérite la visite.
19-Bazbina
Ce village est connu pour sa réserve naturelle,et est un des villages les plus verts de Joumé,la municipalité (ancienne école),et un temple ancien à Wadi El Deir.20-Le site de Nabi Khaled: Situé à Jouezet ed Dara, ce site contient les deux plus grands chênes chevelus du Moyen-Orient surplombant la tombe du prophète Khaled un saint homme qui protège ces arbres anciens que personne n’ose toucher et par conséquent sont devenus majestueux et côtoyant un très beau cèdre.
D’ailleurs , un restaurant local sert de délicieux mets du coin ainsi qu’un marche vers le labyrinthe de rochers ayant dix millions d’années.
Conclusion
Il y a encore pleins d’autres sites à découvrir, c’est à nous, citoyens de faire connaître ces sites au public et les mettre en valeur ainsi qu’à l’État, qui doit préserver ces sites, menacés par le vandalisme ainsi que la négligence.
Par Sergios Roufael